« L'enfant du péché »
extrait de:
En Terres d'Espagne,Portugal et Angola
Ce pauvre enfant n'était pas encore né, qu'il
était déjà maltraité et détesté par un monstre !
Et oui, cher lecteur, le monstre qui ne se sentait
bien que quand il se montrait cruel.
La bête à l’âme perdue, au coeur rongé par la colère, qui comme un taureau
de combat grattait le sol avec sa patte, et criait en crachant du feu par
les yeux :
-
Não me deixes cà o teu bastardo! Não
quero putas nesta casa!
-
« Ne me confie pas ton bâtard, je ne veux
pas de putes dans cette maison ».
Ce monstre vociférant habitait le
cœur de pierre de ta grand-mère. De sa taille volumineuse, elle
remplissait le cadre de la porte d’entrée de la maison. Sa voix
suraiguë et haineuse venait de secouer comme un tonnerre le village de
Roustina ainsi que tout le nord montagneux et granitique du royaume
de Lusitanie.
Ta mère était douce comme les
prairies du Gerês qui ruissellent d' eaux argentées au printemps. Elle éclata
en sanglots. Son cœur était meurtri par cet orage de mots blessants qui regorgeaient
de haine et de mépris.
C'est vrai que petit Wald, tu
avais été conçu trois mois avant le jour de son mariage. Pourtant, ce
jour-là, elle était vraiment heureuse dans sa robe blanche.
Tellement contente de sentir la présence dans son ventre de son
enfant qui allait naître. Elle avait un mari qui la comblait. De plus, son bébé n'avait-il
pas un père?
Tout avait si bien commencé. Elle avait
été si comblée. Elle se rappelait du jour de son mariage. En
marchant vers l'église, son fiancé, qui allait devenir son mari, lui
dit avec humour et beaucoup de tendresse :
-
Si
c'est un fils se sera un grand footballeur, comme Eusèbio, un
Benfiquiste de plus.
Mais à tous moments, les paroles du
monstre retentissaient encore et avec violence, dans sa pauvre tête.
-
Puta sem vergonha sujaste para sempre o
sangue da minha familia e a brancura do vestido de casamento.
C’était en effet, une injure telle que, même le
diable, n'aurait pas osé le dire : «pute sans vergogne, tu as
souillé le sang de la famille et la blancheur de ta robe». Le ventre de
ta maman c'était arrondi, et il était évident qu'elle attendait
un bébé conçu avant le mariage.
Ta mère, la pauvre fût tellement
abattue parce qu'elle avait
entendu qu'elle n’éprouva même pas de rancune. Elle fit
front une fois de plus, la gorge sèche
et la mort dans l'âme sous le soleil du matin.
« Entraste nesta familia para a sujar
mas rapido teras de sair para a limpar. Desaparece para sempre dos meus
olhos. Nunca mais te quero ver. Amanhã mesmo te vou a denunciar ao sr
padre. » ce qui voulait dire approximativement, car traduire, c’est trahir le texte original,
comme l’affirme l’expression italienne traduttore traditore :
-Tu es rentrée dans cette famille pour la
salir, mais au plus vite tu dois en sortir pour la nettoyer. Disparaît pour
toujours de ma vue ! Je ne veux plus jamais te voir !
Demain, j'en discuterai moi-même
avec Monsieur le curé.
Il n’y avait pas la moindre tendresse dans
le feu de sa colère. Tout son corps, cœur et âme était haine, mépris et
intolérance. Ses paroles tombaient sur
ta mère comme un coup de tonnerre dont le claquement retentissait dans tout le
village. Presque toutes les femmes de la commune furent étonnées, mais pas
surprises des propos violents de celle que je n’ose pas nommer ta
grand-mère. Mais que pouvaient-elles
faire contre celle-ci.
Cependant, à ce moment précis,
personne ne pouvait les empêcher de parler, et leurs propos allaient bon
train :
- Femme au cœur rongé par le fiel et
bouffi de méchanceté. Si les chiens avaient la parole, ils ne diraient pas de
telles ignominies. Comment ce monstre de
femme, peut-elle parler ainsi de sa
belle-fille le jour même de son mariage !
C'était sans compter sur
les
quatre ou cinq familles les plus puissantes du village et notamment les femmes. Elles
ne pouvaient pas laisser passer cet indigne affront qui allait à l'encontre de à
la bonne moralité de la petite cité. Mais
grand Dieu que va-t-on dire de nous ailleurs, à Soutugal et même à Lisbonne.
Les mauvaises nouvelles toujours se répandent plus vite que la foudre. Leur
réputation était menacée. Il fallait la défendre coûte que coûte. Pas de temps
à perdre. Elles n’allaient quand même pas laisser cette dévergondée salir leur
honneur et celui de Roustina. Leur devoir et obligation était de chasser du
village cette mal propre, cette belle du
plaisir. Leur zèle de vertu les poussa à agir avant qu’il ne soit trop tard:
-
Il faut laver au plus vite la souillure,
la tâche rouge de la blancheur de notre village de Roustina. Puis l’une d’elles
suggéra :
-
Courrons vite chez Monsieur le Curé, qui
doit-être encore à table. Qu’elle soit excommuniée ou brûlée sur la place du
village.
-
Une
autre ajouta :
-
A sa naissance , jetons le bâtard dans les eaux du Coa avec une pierre
autour du cou. Les poissons et autres bestioles feront le reste…
-
Celle qui n’avait pas encore parlé et dont
la langue était comme un couteau aiguisé, trancha d’un coup sec :
-
Il faut faire un exemple, sinon ce ne sont
pas des petits anges qui vont naître, mais des petits diables
hideux qui vont empester l’air pur de notre village.
L’exemple fut trouvé rapidement ! Malgré les prières en faveur de ta mère de
tout le peuple de Roustina, Monsieur le
curé, sous l’influence des puissants du village, condamna tes parents, non pas
au bûcher, comme le demandaient leurs femmes, mais à l’exil vers les colonies
Africaines aussitôt après ta naissance.
La sentence
Le sermon de ta dite grand-mère avait mis le
village en ébullition comme
l'aurait fait un volcan endormi qui se réveille d'un long sommeil. Les habitants
certes n’osaient pas se révolter frontalement contre la force brute des
puissants, mais ils agissaient indirectement, d’une façon souterraine. Leur
déception et colère n’était qu’endormie prête à bondir lorsque l’occasion se
présenterait de façon propice. Alors, à la tombée de la nuit, les
femmes qui étaient les plus compréhensibles des problèmes se dirigèrent accompagnées de quelques hommes
vers ma maison. Un silence de cercueil les
accueillit, les hommes sifflotèrent pour éveiller mon attention . En effet, le bruit me surpris, et je ne tarda pas à m’approcher de la fenêtre de la
façade de la maison. Ils
m' aperçurent aussitôt derrière les rideaux. Je leur fis signe que
j'allais sortir sans tarder. Je savais pourquoi ils venaient et que surtout les femmes m'attendaient de pied
ferme et avec impatience
-
Comment David peux-tu laisser ton serpent de femme cracher ainsi
son venin à l’encontre de ton fils et de ta belle fille. N’était-elle la fille
que tu attendais ?
-
Écoutez, je vais faire de mon mieux. Je
m'efforçais de parler calmement essayant ainsi de calmer la colère des
femmes.
-
Mais es-tu un homme ou … ? Vas-tu
laisser ta vipère….
-
Ce n’est pas cela ! Je ne peux quand
même pas la tuer sur le champ il y a d’autres façons de faire.
-
Moi je vais lui écraser la tête à ton serpent si tu n’en n'es pas capable.
Vous les hommes vous nous pousser à faire des bêtises, mais au bout du compte
c’est nous qui les payons.
-
Tu es responsable de ton fils, non ?
Dit une femme plus que respectable que l'âge courbait, puis elle ajouta
encore :
-
Cela ne se serait jamais passé de mon
temps. Au lieu d’avancer l’on recule dans ce pays. Maintenant il n’y a plus de
femmes, plus d’hommes capables de se battre. Moi Monsieur j’ai fait la Maria da
Fonte. Qu’attendez-vous pour faire une autre rébellion !
-
Elle viendra, Elle viendra senhora
Francisca.
-
Je me sentais fatigué et
abattu, j'avais les traits tirés,en me tournant vers
le groupe, je leur dis :
-
Je sais que vos cœurs sont meurtris par ce
qui arrive. Je sais que votre indignation est grande. Je sais que vous ne
pouvez pas comprendre de raison ce qui est inacceptable. Je sens dans mes
entrailles une révolte encore plus grande que la vôtre.
Tout cela me touche personnellement.
Sachez que je ne fais pas de différence.
Il n’y a pas ici un homme contre une femme Madame Francisca. Ils sont tous les deux mes enfants, aussi
bien l’un que l’autre sans distinction, ainsi que le bébé qui est dans le ventre de sa mère.
Ils sont la chaire de ma chaire ! Vous comprenez.
-
Mais alors David, fais quelque
chose pour ton fils et pour cette malheureuse. Cours chez le curé, interviens au plus vite. Alors
magne-toi le cul, allez file, que fais-tu là à attendre.
Celle
qui parlait comme une mère était la vieille Francisca.
En
l’écoutant, je ne pus retenir mes
larmes, elles coulaient sur mes joues, chaudes et abondantes comme
celles de Madeleine à la mort de Jésus. Puis entre deux sanglots, je
murmurais :
-
Ça ne sert à rien !
-
Mais pourquoi ? Demanda une femme interloquée !
Ça fait plus de deux heures que je suis revenu
de chez le curé. Leur décision était déjà prise. A l’heure qu’il est je suis un père sans ses
enfants !
-
Mais comment cela David ? S’étonnèrent-ils
en cœur.
-
Expulsés vers l’Afrique ! Ils
devront partir dès que le bébé naîtra..
-
Ainsi la semaine de ma naissance n’était
pas encore finie que mes parents et moi , nous attendions sous surveillance policière à Lisbonne le
paquebot Vera Cruz à destination de Luanda en Angola.
* * *
« Angola »
Angola, N’Gola pays tropical
Africain, lusophone et Austral
Paradis meurtri de l’Afrique
Ta beauté est sans égal.
Peuple injustement mal traité
Quand seras-tu enfin aimé !
Ô Angola, mon joli pays
Quand seras-tu enfin béni,
Cinq-cents ans déjà ! Ça suffit.
Réveillez-vous les Orishas africains
Et toi belle Oshum, déesse des
rivières !
Sors des pantalons de Shangô,
Couvre-toi de jaunes parures,
Va chercher ton miroir,
Détourne ton cours d’eau,
Dépose sur la table des convives
Un joli vase de verre transparent,
Embellis de fleurs tropicales :
Un pied, droit, fier, puis deux et trois
Jaunes-verts-rouges d'Heliniconia
Becs de perroquet,
Pinces de homard,
Impatience de Zanzibar!
Il est plus que temps Oshum
Réveille-toi et vas! Allez, dépêche-toi
Mais triste aveugle, ne vois-tu que
Mon
Angola a besoin d’espoir !
"Arrivée à Luanda"
Là-haut,
dans le ciel bleu de Luanda, le soleil du mois août déchirait les chiffons de
nuages blancs. A droite s’étendait le tapis vert des pelouses piétinées par
quelques maisons coloniales hautaines et méprisantes. A gauche s’étendait sans
fin « le Musseque », la favela angolaise. Des cases carrées
misérables au toit de zinc se dressaient dans le rouge de la terre à l’odeur de
sang. Dans la baie de Luanda ,un vent capricieux sortait les
cocotiers de la plage de leur somnolence et hérissait la crêtes des vagues de moutons blancs. .... la suite continue...
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